Les formations certifiantes proposées par la FORDIF se structurent autour de projets professionnels concrets, que les participants, tout au long de leur parcours, planifient et mettent en oeuvre au sein de leur établissement ou au sein de leur cadre professionnel.
Sur cette page, Claude-Alain Granges nous présente le projet mené au Cycle d’Orientation de Leytron
Le C.O. de Leytron accueille annuellement environ 370 élèves qui proviennent des communes de Leytron, Riddes, Isérables, Saillon et Chamoson. L’équipe pédagogique est composée d’une quarantaine d’enseignant-e-s. L’établissement s’est ouvert en 1974 avec la création du CO régional de Martigny.
Le cycle d’orientation de Leytron comptait en 2014 deux classes spéciales (Une classe d’adaptation et une classe d’observation).
Les statistiques descriptives ci-dessus permettent d’indiquer que le C.O. de Leytron privilégie une approche inclusive pour les Elèves à Besoins Educatifs et Scolaires Particuliers (BESP).
Néanmoins, à l’origine du projet en 2014, le Conseil de Direction constatait l’absence d’un dispositif adéquat de prise en charge, d’encadrement et de coordination des élèves BESP en classes ordinaires (absence de signalement, transitions perfectibles, différenciation et aménagements insuffisants, absence de co-enseignement, absence de coordination et de suivi, surcharge de travail…).
Le conseil de direction a consacré tout d’abord une attention particulière aux transitions des élèves BESP.
Même si les parents sont légalement responsables du signalement des besoins particuliers de leur enfant (DECS, 2010, 2013), il reste que certains omettent de le faire, croyant que les informations circulent sans entrave de l’école primaire (EP) au CO et du CO au secondaire II, professionnel ou scolaire.
Pour y remédier, la direction se rend chaque année à l’EP en mai pour y assister à l’entretien organisé en fin de 8H entre le maître et les parents d’enfants BESP.
Ces rencontres ont le mérite de faciliter l’échange d’informations, de rassurer les parents, tout comme les élèves, et de permettre d’organiser, dès la rentrée, l’encadrement adéquat des élèves BESP.
Mais l’on ne saurait se soucier du sort des élèves BESP qui arrivent au CO, sans penser à ceux qui le quittent. Pour permettre à ces derniers une transition harmonieuse vers le secondaire II, la direction adresse une lettre aux parents, en mai, qui les informe de la possibilité d’aménagements dans les écoles subséquentes et des procédures pour les obtenir.
Avant d’aller plus avant, il a semblé essentiel de comprendre quelle était la place dévolue, au sein de l’organisation, au processus de gestion des élèves BESP de classes ordinaires.
La carte des processus permet de mettre en évidence la place occupée par la gestion des élèves BESP : elle appartient aux processus centraux et constitue, outre la formation et l’orientation, une des trois valeurs ajoutées principales de l’établissement.
Il ne suffit pas de placer des élèves BESP en classe ordinaire pour pouvoir parler d’inclusion. Pour que cette dernière soit effective, il a semblé primordial que les étapes du processus de prise en charge des élèves BESP soient respectées : signaler et identifier les besoins, décider des mesures d’aide individuelles, contrôler leur application, les ajuster et améliorer le processus de prise en charge.
L’enseignement coopératif, ou co-enseignement, implique non seulement la co-planification, mais également la co-instruction et la co-évaluation (Scruggs, Mastropieri & McDuffie, 2007).
L’établissement a pu obtenir successivement, pour les rentrées 2014 et 2015, six heures de co-enseignement en contexte inclusif.
La direction se soucie de maximiser les chances de bon fonctionnement de cet enseignement coopératif en respectant un ratio maîtres – élèves BESP acceptable, en choisissant avec soin les enseignants spécialisés et ordinaires les plus favorables et les mieux formés (formation initiale ou continue) à l’inclusion, tout comme à la coopération.
L’engagement du personnel se caractérise comme « un processus par lequel l’organisation définit les profils de postes à repourvoir et choisit les personnes les plus adéquates pour les occuper, puis assure leur intégration » (Emery et Gonin, 2009, p. 43).
Le poste de référent et personne-ressource en faveur des élèves BESP de classes ordinaires, créée à la rentrée 2014, a été le plus délicat à pourvoir. Il nécessite, en effet, chez son titulaire, une attitude favorable à l’inclusion et au coenseignement en contexte inclusif, ainsi que le sens des responsabilités. Ce pédagogue est la véritable cheville ouvrière du dispositif de prise en charge des élèves BESP scolarisés en classes ordinaires et la courroie de transmission entre l’adjoint de direction et les enseignants titulaires ou de branches.
Après un premier tri des dossiers, les candidats retenus ont été convoqués en mars pour un entretien de sélection structuré, dont les composantes ont été standardisées selon un plan type (Pettersen et Durivage, 2006).
Les candidats finalistes ont été invités, lors d’une seconde entrevue, à participer à un échantillon de travail, soit à une simulation de coenseignement en contexte inclusif auprès d’élèves BESP en classe ordinaire d’une durée d’une période d’enseignement, exercice supervisé par le directeur et son adjoint. Chaque candidat avait reçu, une semaine auparavant, des consignes claires et a été soumis au même échantillon, dans des conditions similaires, de manière à permettre une comparaison des performances.
Une check-list d’accueil et d’intégration a facilité, enfin, la préparation et le suivi de l’intégration du nouveau collaborateur, dont la nomination par la direction a été entérinée par le conseil d’administration et par l’État.
Pour permettre une vision d’ensemble, la direction a intégré le processus susmentionné dans une ébauche de tableau de bord équilibré (TBE) complet.
Une version simplifiée du TBE, se limitant aux indicateurs concernant la gestion des élèves BESP de classes ordinaires, permet à la fois d’ajuster les aménagements de ces élèves et le processus de gestion de ces derniers.
Les résultats obtenus dans l’enquête de satisfaction auprès des élèves et de leurs parents peuvent être jugés satisfaisants.
Le jugement des enseignants sur ce point est resté néanmoins en deçà des prévisions, certes très ambitieuses, et ce malgré une progression remarquable dépassant les 10% en une année. Ils étaient les seuls, en 2014-15, à juger l’encadrement des élèves BESP de classes ordinaires au CO de Leytron plus sévèrement.
Références :
Emery, Y. et Gonin, F. (2009). Gérer les ressources humaines. Des théories aux outils, un concept intégré par processus, compatible avec les normes de qualité (3e ed.). Lausanne : Presses polytechniques et universitaires romandes
Petterson, N. et Durivage, A. (2006). L’entrevue structurée. Québec : Presses de l’Université du Québec.
Scruggs, T.S., Mastropieri, M.A. et McDuffie, K.A. (2007). Co-Teaching in Inclusive Classrooms: A Meta-synthesis of Qualitative Research. Exceptional Children, 73(4), 392-416.
Thomazet, S. (2006). De l’intégration à l’inclusion : Une nouvelle étape dans l’ouverture de l’école aux différences. Le Français aujourd’hui, 152, 19-27